samedi 30 juillet 2016

Michel Serres : enchanteur du monde nouveau !

Héritier des grands philosophes, Michel Serres est non seulement un homme du 21e siècle, mais aussi du 22e, porteur d’une culture qui embrasse toutes les sciences.

Philosophe, écrivain, mathématicien, historien des sciences, académicien..., il est un penseur du monde de demain, pour qui "penser, c’est anticiper". Aimant peu se confier,
Michel Serres a pourtant accepté de jouer le jeu du grand portrait dans La Marche des sciences.

Arpenter, avec lui, son univers, ses pensées et le monde, d’aujourd’hui et de demain, un univers dont le grand récit se déploie sur 15 milliards d’années. Etre pantope, à ses côtés, apprendre de toutes les sciences avec lui qui sait si bien faire le pont entre tous les savoirs.
( Sur France- Culture début Aout 2016 )

A la suite d'un article de ce blog  intitulé : " Jean-Louis à Compostelle " (25 Juin 2016 ) et fait echo à un autre bien plus ancien " Penser avec ses pieds …" ( 23 Mars 2014 )




Eloge de l'amitié. René Girard et Michel Serres 
( emprunté au club de Médiapart … qu'on se rassure, je n'en prendrai pas l'habitude ! )

                               Chacun y va de son petit papier élogieux sur l'oeuvre de René Girard, depuis l'annonce de sa mort - ce qui n'était pas vraiment le cas de son vivant. Banal, direz-vous. Girard n'avait pas fait carrière en France et l'on avait de la peine à le ranger sous une étiquette - ce chartiste qui passait à la littérature, de la littérature à l'anthropologie, puis à la théologie, puis à l'exégèse biblique, sans renoncer pour autant à ses premières approches était difficilement classable. En plus, on croyait pouvoir résumer son travail en une ou deux formules : la rivalité qu'engendre le désir mimétique, le mécanisme du bouc-émissaire comme solution provisoire à la violence dont la rivalité est l'origine, sans avoir à entrer dans le détail d'une oeuvre complexe et de vaste culture, autant dire qu'elle entrait mal dans les formats et les formatages dominants.

                               Ceux qui l'ont vraiment connu savent l'importance dérangeante de sa pensée en cette période d'incertitudes où nous sommes. Je pense à Michel Serres, à Benoît Chantre, en particulier.

                               J'ai relu, ces jours-ci, le très beau discours prononcé par Michel Serres en réponse à celui que venait de tenir René Girard, lors de sa réception à l'Académie française. Oui, il arrive qu'en cette institution la pensée s'élève. (René Girard & Michel Serres, Le Tragique et la Pitié, éditions Le Pommier, 2007) Michel Serres, avec cet humour qui n'appartient qu'à lui, évoque la théorie de Karl Popper qui veut que le caractère scientifique d'une théorie soit lié à sa falsifiabilité, c'est-à-dire à la possibilité de lui opposer des arguments qui montrent qu'elle se trompe sur  tel ou tel de ses points. Or, on reprochait à Girard (comme Popper l'avait fait pour le marxisme et la psychanalyse) d'affirmer la valeur universelle, et donc sans conteste possible, de sa théorie.

                               Qu'à cela ne tienne. C'est en rappelant l'amitié qui les lie depuis plusieurs dizaines d'années, depuis que René Girard accueillit  aux Etats-Unis un Michel Serres que l'Université française dédaignait que Serres s'emploie à l'entreprise, difficile, de falsifier les hypothèses de Girard. "En public, ce soir, je puis jurer les dieux devant les autels du monde, et sans risque de parjure, que je n'ai jamais ressenti ombre de jalousie ni de ressentiment à votre égard, quelque admiration que je  vous porte. Veuillez donc me considérer comme un monstre, comme un double sans rivalité, donc falsificateur de votre modèle ; de la sorte, nous pouvons l'admettre dans l'exactitude rigoureuse du savoir. Quoi  de plus réjouissant, vous en conviendrez, qu'un ami vrai joue assez le faux ami pour pouvoir démontrer, en la falsifiant, la vérité décrite par son ami ?"

                              Bel exemple d'une complicité intellectuelle peu fréquente dans notre Université !

 

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